Les gens vont et viennent, les lieux changent, rien ne reste immobile. C’était un concept qui tracassait beaucoup le singer-songwriter ELLIOT MOSS quand il regardait ses amis bouger autour de lui pendant qu’il restait tranquillement chez lui à travailler sur son premier album, Highspeeds.

C’était il y a trois ans, et le temps joue maintenant résolument en faveur de cet auteur de chansons, producteur et multi-instrumentiste de 21 ans. Highspeeds est sorti en mai aux Etats-Unis sur Grand Jury et a vu Elliot être acclamé par The Fader et SPIN, faire la première partie de Cold War Kids et se produire au cours du fameux showcase FADER Fort de SXSW.

Highspeeds [Grande vitesse, NdT] est maintenant prêt à prendre encore plus de vitesse, puisque l’album doit sortir au Royaume-Uni sur PIay It Again Sam le 16 octobre. C’est un disque chargé d’une émotion à couper le souffle, qui voit Elliot puiser sans effort dans l’electro, le jazz et les atmosphères ambient pour créer un paysage sonore dans lequel on peut totalement s’immerger. Ce mélange est encore plus complet grâce au chant d’Elliot, d’une incroyable richesse, qui trahit une bien plus grande maturité que son jeune âge ne pourrait le laisser deviner. Highspeeds est un premier album parfaitement à sa place en compagnie des œuvres de Bon Iver, Chet Faker, Washed Out et James Blake.

Elliot a grandi dans la petite ville paisible de Mamaroneck, tout près de New York. Appartenant à la troisième génération d’une famille de musiciens et d’artistes, Elliot était destiné à devenir musicien. Il a commencé très tôt à apprendre la guitare, avant de choisir la batterie pour pouvoir « faire partie du club ». Après avoir écrit sa première chanson à l’âge précoce de 13 ans, il est rapidement passé à l’étape consistant à jouer dans des groupes de son lycée, principalement pour comprendre la dynamique que l’on obtient en jouant avec d’autres musiciens, ce qui a influencé l’écriture de ses propres chansons.

C’est en classe de seconde que les premières graines de Highspeeds ont réellement été semées par Elliot, dans un éclair de génie. Il passait du temps dans son studio, installé dans sa chambre, à étoffer les paroles qui tournaient dans sa tête toute la journée, ou à enregistrer des parties de guitare, à programmer des beats et à faire des overdubs.

Il employait aussi son temps à se concentrer sur la fabrication d’instruments et sur la découverte de son matériel. « Quand j’écris des chansons, je n’ai pas le temps de tripoter des boutons ou de jouer avec des pédales », dit-il. « Mais quand le moment est venu de tirer profit de toutes ces expérimentations, je peux enfin utiliser ce super effet avec un écho que j’ai découvert, par exemple, ou tout autre truc qui est apparu pendant que je bidouillais. »

De façon encore plus impressionnante, il a économisé ce qu’il avait gagné en concevant des sites internet pour construire son propre home studio, dans le but d’enregistrer l’album, customisant notamment son propre synthétiseur modulaire. « Je me suis fait aider par un ami pour les aspects les plus compliqués du câblage », explique Elliot. « C’est à la base un synthé vintage appelé “SEM” et j’ai construit tous les panneaux et les graphiques qui abritent les modules, un assemblage assez complexe. On peut aborder des territoires étranges avec cet instrument, c’est sûr. »

Les douze titres de Highspeeds superposent les thèmes de l’espoir et de la perte sur des rythmes puissants et répétitifs. C’est une atmosphère qui est née, dit Elliot, en regardant ses amis partir alors qu’il restait statique. « Tout le monde poursuivait sa route, faisait son propre truc… partait à la fac ou voyageait », dit-il. « J’avais l’impression que tout le monde bougeait plus vite que moi, parce que tout ce que je faisais, c’était de rester assis là, à faire de la musique. »

Le premier titre, qui donne son nom à l’album, « Highspeeds », fait parfaitement écho à ce sentiment quand le chant céleste d’Elliot répète méthodiquement le refrain, « you’re traveling highspeeds and you’re fast, too fast to chase anymore » [Tu voyages à toute allure et tu vas vite, trop vite maintenant pour que je parte à ta poursuite] sur fond de beat ambient tranquille et d’orchestration tournoyante.

Le jazz sensuellement soul de « Slip » dissimule une complainte mélancolique destinée à un ami, dévoilée quand la voix d’Elliot, imprégnée d’une maturité impressionnante pour son jeune âge, chante « where’s the light I used to know ? » [Où est la lumière que je connaissais ?] sur un accompagnement de cuivres menaçants. « Slip » a pris forme très vite. « J’ai ce vieux Pianet (un piano fabriqué un temps par Hohner) qui est plus ou moins désaccordé, et j’étais en train de jouer avec un effet d’harmonizer », se souvient Elliot. « J’ai commencé à chanter. Au bout d’environ 30 minutes, la chanson était écrite. »

A l’origine, quand Elliot a mis lui-même l’album en ligne, à l’âge de 19 ans, ses ambitions étaient très modestes. « J’espérais que quelques personnes l’entendraient et je me disais que ça pourrait être quelque chose que je ferais comme un exutoire créatif amusant dans ma vie », dit-il. Aujourd’hui, à la lumière de l’accueil enthousiaste réservé à Highspeeds, son ambition créative s’est développée, puisqu’il espère suivre les traces de musiciens comme David Byrne et Damon Albarn. Et continuer à faire une musique généreuse, sans limites. « J’admire des gens qui ont ainsi de multiples facettes. On dirait des piles électriques qui peuvent tout faire, et se transformer en ce qu’ils veulent, de façon extraordinairement authentique », dit Elliot, avant d’ajouter modestement, « Je rêve de pouvoir un jour être simplement un quart, non, un seizième, de ce qu’est David Byrne ».

Quatre mois seulement après avoir donné son premier concert à Rough Trade NYC, Elliot est parti pour la première fois sur la route cette année, en première partie de Cold War Kids, aux Etats-Unis et au Canada. Jouer live est une expérience qu’Elliot apprécie autant que d’être en studio, puisque sur scène, il recrée entièrement l’album avec son groupe de cinq musiciens. « Au début, c’était assez terrifiant », confesse Elliot. « Mais maintenant, j’adore vraiment jouer live avec mon groupe parce qu’il y a beaucoup d’interaction entre nous et que des choses différentes se produisent chaque soir. Le set continue à se développer et à changer en permanence. »

Highspeeds a beau prendre de plus en plus de vitesse, Elliot reste encore très humble, de façon plutôt attachante, au sujet de ses espoirs pour cet album. « J’adorerais que les gens ressentent exactement ce que j’ai ressenti quand j’écrivais les chansons », dit-il énergiquement. « Rencontrer les mêmes émotions et peut-être prendre certaines des résolutions que j’ai moi-même prises après les avoir ressenties. »

Seul l’avenir le dira.

Highspeeds sortira sur Play It Again Sam le vendredi 16 octobre 2015.