EN CONCERT LE 19 MAI AU RESERVOIR

With a steel guitar and a microphone
I hope that you will find your way
Someday you’ll find out who you are
Someday you’ll be more than just a shooting star
(Avec une guitare steel et un micro/ J’espère que tu trouveras ta voie/ Un jour tu découvriras qui tu es/ Un jour tu seras plus qu’une simple étoile filante)
-- “Shooting Star” de Harper Simon

Écoutez le brillant premier album solo de Harper Simon et vous reconnaîtrez vite que cet artiste est bien plus qu’une étoile filante. Harper Simon est l’œuvre d’un singer-songwriter exceptionnellement doué, doublé d’un guitariste qui a manifestement découvert qui il était et trouvé sa propre voie, en enregistrant des disques à une époque où le concept même d’album semble menacé. Simon partage ici avec un art consommé ce sentiment de découverte, tout au long d’une œuvre ambitieuse et profondément sentie qui offre un rappel saisissant, voire obsédant, du fait qu’un album peut encore vouloir dire quelque chose en 2010.

Pour Harper Simon, l’opportunité de faire ici son propre album était une affaire très importante. “L’album LP est le grand moyen d’expression artistique inventé au cours de la seconde moitié du 20ème siècle,” dit Simon. “Un album, ce n’est pas juste dix chansons jetées ensemble au hasard. Il décrit un arc, il a une structure. C’est une tentative de faire dix chansons qui soient toutes aussi bonnes les unes que les autres, et qui aillent ensemble, qui forment un tout continu. Des albums comme Sgt Peppers, Bridge Over Troubled Water, Pet Sounds, Blonde On Blonde, Sticky Fingers – ces albums ont aidé à définir notre culture. Pendant que je faisais ce disque, j’étais très conscient qu’il s’agissait d’un hommage au LP.”

Dès le premier titre de l’album, une nouvelle version du traditionnel gospel “All To God”, jusqu’à sa dernière chanson extrêmement romantique, “Berkeley Girl,” Harper Simon représente un tout continu et pourtant très varié. C’est également un cycle de chansons profondément musical et poétique qui reflète un amour profond et un respect durable pour les traditions du passé, et qui semble néanmoins attaché faire de la super musique au présent.

Simon a enregistré ce nouvel album à Nashville, New York et Los Angeles, avec l’aide d’un groupe de collaborateurs musicaux couvrant plusieurs générations absolument impressionnant et résolument éclectique, parmi lesquels le célèbre producteur Bob Johnston, une bande de musiciens de Nashville de tout premier plan, stars chevronnées des studios, un impressionnant groupe de jeunes singer-songwriters contemporains, des amis et même, eh oui, son propre père, le légendaire Paul Simon.

Howdy
I’m gonna tell you a story
Most of it is true
It goes back to my early memory
And maybe it will show you
Why I do the things I do
I was born in New York City
But my mom’s from Tennessee
(Salut/ Je vais te raconter une histoire/ En grande partie vraie/ Qui remonte à mes premiers souvenirs/ Et peut-être va-t-elle te montrer/ Pourquoi je fais ce que je fais/ Je suis né à New York City/ Mais ma mère est du Tennessee)
-- “Tennessee” de Harper Simon et Paul Simon

La réalisation de Harper Simon a fini par être un voyage en soi. Simon a commencé le long et minutieux processus d’enregistrement de cet album à Nashville, couchant les parties de base avec Johnston – l’homme qui se tenait derrière la console des grands enregistrements classiques de Bob Dylan, Johnny Cash et Leonard Cohen – accompagné par un véritable Who’s Who d’habitués des séances d’innombrables classiques des sixties et des seventies, parmi lesquels des gens comme Charlie McCoy, Lloyd Green et Hargus “Pig” Robbins. “J’ai été très honoré, ravi et touché au-delà des mots d’avoir la possibilité de travailler avec des personnes qui avaient joué sur certains des meilleurs albums de tous les temps,” explique Simon. “Des gens que j’avais écoutés toute ma vie et dont je ne connaissais les noms que par les notes de pochettes et les crédits de production.”

“Travailler avec Bob Johnston et tous ces musiciens de séance de Nashville des années 60 était tout à fait fascinant et très agréable,” dit Simon. “Avoir Lloyd Green totalement à ma disposition, lui qui jouait de la pedal steel sur le Sweetheart Of The Rodeo des Byrds. Je ne peux pas vous dire combien d’acides j’ai pris en écoutant cet album. Charlie McCoy, Pig Robbins... putain. Blonde On Blonde, Nashville Skyline... Hou la la. J’ai pu travailler avec Al Perkins, dont je connaissais le nom par la pochette d’Exile On Main Street. Bien qu’il ne figure finalement pas sur l’album, il est présent sur un titre bonus. Gene Chrisman a joué la batterie sur le “Natural Woman” d’Aretha... Mike Leech et Gene constituaient la section rythmique d’ELVIS. Leur maîtrise musicale est exceptionnelle, et leur attitude envers moi a été très encourageante... C’était vraiment spécial.”

A la recherche d’un son qui le satisfasse, Harper a décidé d’emmener à Los Angeles, puis à New York, ces bases enregistrées à Nashville, et a progressivement intégré d’autres grands instrumentistes associés à des époques différentes, dont toute une nouvelle génération d’amis musiciens extrêmement talentueux parmi lesquels Inara George, Petra Haden et Sean Lennon, mixant finalement le tout avec Tom Rothrock - connu pour son travail avec des artistes comme Beck et Elliot Smith - qui ont tous aidé à apporter le choc de la nouveauté. Ça fait peut-être une foule d’intervenants, mais le résultat reflète parfaitement la large étendue des influences et de la sensibilité d’un homme.

“Le gens qui se sont rassemblés pour contribuer à cet album forment une troupe totalement bizarre et magnifique qui ne se réunira plus jamais,” explique Harper. “Il y a là des musiciens qui représentent chaque époque du Rock’n’Roll, des années 50, 60, 70... de chaque décennie jusqu’à aujourd’hui, en fait. Des gens comme Bob Johnston, mon père et le Nashville A Team, ont commencé à faire des disques dans les années 50. Puis ils ont fait quelques-uns des disques les plus révolutionnaires des sixties. Il y a des gars comme Steve Gadd et Steve Nieve qui ont joué sur de grands disques des seventies... Marc Ribot dans les années 80... Et bien d’autres d’aujourd’hui comme Inara George, Eleni Mandell, Sean Lennon et Adam Green, pour n’en citer que quelques-uns. J’ai toujours voulu mélanger ces grands musiciens de studio des années 60 avec mes amis et mes contemporains... ça a toujours fait partie du concept. Je pense que je me suis parfois peut-être un peu laissé emporter, mais ce qui est sûr, c’est qu’on s’est bien amusé.”

Everyone seems so certain
Everyone knows who they are
Everyone’s got a mother and a father
They all seem so sure they’re going far
They all got more friends than they can use
Except me ‘cause I’m a fool
I’m simple as a bee
As a melody in C
But it don’t matter
There are more wishes than stars
(Tout le monde semble tellement sûr/ Tout le monde sait qui il est/ Tout le monde a un père et une mère/ Ils semblent tous si sûrs d’aller loin/ Ils ont tous plus d’amis qu’ils n’en ont besoin/ Tous sauf moi, parce que je suis un idiot/ Je suis aussi simple qu’une abeille/ Qu’une mélodie en do/ Mais ça ne fait rien/ Il y a plus de souhaits que d’étoiles)
-- “Wishes And Stars” par Harper Simon et Ben Okri

Album marqué par une intelligence accessible et une variété musicale inhabituelle, Harper Simon n’est peut-être pas “Aussi simple qu’une abeille/ Qu’une mélodie en do.” C’est plutôt la déclaration d’une considérable ambition musicale, qui fournit les fondations parfaites à l’émergence d’une nouvelle voix fascinante. En effet, malgré le soutien crucial reçu de tant de grands musiciens, Simon lui-même est ici partout. Il chante la plupart des somptueuses harmonies évocatrices de l’album, joue également la majorité des étourdissantes parties de guitares, et co-écrit les mémorables arrangements de cordes et de cuivres, qui apportent à l’album tant de nuances de couleurs musicales inoubliables.

Au bout du compte, il est clair qu’il y a du vrai sang dans ces morceaux (Blood On The Tracks), pour emprunter une phrase à une autre icône qui n’est pas le père de Simon, et il n’y a aucun doute que ce sang soit celui de Harper Simon. Finalement, c’est un album qui reflète d’une manière saisissante le long chemin ayant permis à Simon d’arriver au point où il a été prêt à exposer ses revendications musicales.

Le Harper Simon qui émerge ici comme un nouvel artiste important, avec du talent à revendre et une vraie sincérité dans ses résolutions, comprend parfaitement qu’il y a “réellement plus de souhaits que d’étoiles” – pour emprunter une phrase tout aussi éloquente d’une autre chanson remarquable, écrite par Simon et le célèbre romancier Ben Okri. Et ainsi, il a pris le temps et le soin de réaliser un album fait pour durer. Et ce n’est vraiment qu’un début.